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couloir

  • Campus (2015)

    FRANÇAIS

    J’erre dans les couloirs de la fac de lettres, exceptionnellement vides, repeints de frais, comme un cadeau que me ferait le destin ; me laisser déambuler ici, enfin seul, comme dans un rêve ou dans mes souvenirs matérialisés – car tous mes souvenirs ou presque sont des souvenirs solitaires.

    Des rideaux opaques, grisâtres, comme teintés par des siècles de poussière et de pénombre, cachent l'intérieur de certains bureaux, comme des maisonnettes au milieu des couloirs. Des mondes imbriqués, cachés. Certains sont manifestement occupés ; on devine des lampes allumées à travers le tissu. Aucun bruit ne s'en échappe. Qui est là ?

    Un peu plus loin, des portes en verre armé laissent filtrer des lumières rouges, ou bleues, intense et étranges, comme si l’on avait installé dans les salles qu’elles cachent des projecteurs de couleurs. Et la lueur verdâtre qui s’échappe des toilettes publiques. Entre tout cela, des poches d’ombres, des couloirs déserts aux ombres interminables. On a l'impression d'avancer dans un espace qui pour toujours existe dans un temps qui n'est ni le jour, ni la nuit.

    L'architecture brutaliste, uniformément grise des bâtiments, lorsqu'on les entrevoit par une fenêtre, ne laisse rien deviner du monde chaud, intime, d'ombres et de poches de couleurs qu'ils recèlent.

    ENGLISH

    I wander through the halls of the humanities building, exceptionally empty, freshly repainted, like a gift from fate; letting me roam here, finally alone, as if in a dream or in my memories made tangible – for all my memories, or almost all, are solitary ones.

    Opaque, grayish curtains, as if stained by centuries of dust and gloom, hide the interiors of certain offices, like little houses nestled within the corridors. Interlocking, hidden worlds. Some are clearly occupied; you can make out the glow of lamps behind the fabric. No sound escapes. Who’s in there?

    A bit further on, doors of reinforced glass let through red or blue light, intense and strange, as if colored spotlights had been installed in the rooms beyond. And the greenish glow leaking from the public restrooms. Between all this, pockets of shadow, deserted corridors with endless silhouettes. It feels like moving through a space that forever exists in a time that is neither day nor night.

    The brutalist architecture, uniformly gray, glimpsed through a window, gives no hint of the warm, intimate world inside—a world of shadows and pockets of color it secretly holds.

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  • IUT / Institute of Technology (1993)

    iut.jpg

    FRANÇAIS

    J'aimais les vieux couloirs de l'IUT ; et plus encore ses cages d'escalier qui, à partir d'une certaine hauteur, étaient constamment désertes et silencieuses. Elles étaient comme des zones de tranquillité ou d'anonymat où je passais de temps à autre, quitte à faire un détour, pour le plaisir d'entrer quelques secondes dans cet espace étrange à l'écart de la fourmilière. Il m'arrivait d'en rêver. Ou de fantasmer à leur sujet. Je ne saurais pas dire quoi exactement ; peut-être de gravir - ou descendre - les marches éternellement, ou alors de découvrir des étages inconnus, nouveaux, fascinants.

    Ai-je montré ces couloirs, ces cages d'escalier, à Laura, lorsqu'elle était venue me rendre visite à Nancy ? L'ai-je rêvé ? L'ai-je simplement imaginé puis intégré fallacieusement au récit de ma vie ?

    « Elle vous avait suivi docilement dans les couloirs infinis de l'Université, toujours plus sombres, plus silencieux, au fur et à mesure que vous y avanciez ; parfois vous croisiez de petits groupes d'étudiants, silencieux, semblant attendre quelque chose, ou assis à des pupitres, à même le couloir. Vous vous étiez ensuite perdus dans d'interminables cages d'escaliers, où de nombreux d'étages s'avéraient inaccessibles, à travers leurs portes vitrées verrouillées, que d'autres couloirs, d'autres escaliers. »

    Je rêve encore régulièrement, je rêve régulièrement depuis vingt ans des couloirs de la fac de Lettres et de l'IUT, et de ceux de mon lycée, de ceux du collège... Des couloirs où je me perds, où je cherche une salle que je ne trouve pas, des couloirs que je hante en sachant que je n'ai plus rien à y faire, ou bien, au contraire, où je reviens pour acquérir quelque chose que j'ai raté à l'époque et qui me manque. Parfois bondés, bruyants, pleins de vie. Parfois silencieux et obscurs. Ils sont le lieu, quoi qu'il en soit, où se rencontrent le destin individuel dans ses moments les plus décisifs - la formation, les choix faits pour l'avenir - et la découverte de la vie collective, l'appartenance heureuse ou pénible au troupeau.

    ENGLISH

    I loved the old corridors of the Institute of Technology; and even more so its stairwells which, from a certain height, were constantly deserted and silent. They were like zones of tranquility or anonymity where I would occasionally pass through, even if it meant taking a detour, just for the pleasure of spending a few seconds in this strange space, apart from the bustle. Sometimes I dreamed of them. Or fantasized about them. I couldn’t say exactly what; maybe endlessly climbing – or descending – the steps, or discovering unknown, new, fascinating floors.

    Did I show those corridors, those stairwells, to Laura when she came to visit me in Nancy? Did I dream it? Did I simply imagine it and then deceitfully incorporate it into the story of my life?

    "She had obediently followed you through the endless corridors of the University, growing darker, quieter the further you went; sometimes you crossed small groups of students, silent, seeming to wait for something, or sitting at desks right in the hallway. You then got lost in endless stairwells, where many floors proved inaccessible, behind their locked glass doors, leading to other corridors, other staircases."

    For twenty years now, I still regularly dream of the corridors of the Faculty of Letters and the Institute of Technology, and of those of my high school, of my middle school… Corridors where I get lost, where I search for a room I can’t find, corridors I haunt knowing I no longer belong there, or on the contrary, where I return to retrieve something I missed at the time and that I now lack. Sometimes crowded, noisy, full of life. Sometimes silent and dark. They are, in any case, the place where individual destiny meets its most decisive moments – education, choices made for the future – and the discovery of collective life, the happy or painful belonging to the herd.

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  • Fourmilière / Beehive

    FRANÇAIS

    Je suis censé aller chez P. dans son logement d'étudiant sur un campus. Ou bien est-ce moi, l'étudiant ? Je passe par des couloirs labyrinthiques, interminables, des escaliers, des halls ; partout, des logements étudiants, des étudiants qui déambulent ou regardent la télé en groupe dans un couloir, etc – une ambiance de fourmilière. Plus tard je visite d'autres lieux, des immeubles déstructurés, à moitié détruits et/ou abandonnés, avec des escaliers et des passages à l'air libre entre les étages ; mais tout paraît normal. Il y a un appartement que je visite là-dedans ; le mien, ou celui de P.

    ENGLISH

    I’m supposed to go to P.’s student accommodation on a campus. Or maybe I’m the student. I pass through labyrinthine, endless corridors, staircases, lobbies; everywhere, student rooms, students wandering around or watching TV in groups in the hallway – a bustling, ant-like atmosphere. Later, I visit other places, distorted buildings, half-destroyed and/or abandoned, with open staircases and passages between floors; yet everything seems normal. There’s an apartment I visit inside one of those buildings – mine, or P.’s.

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  • Rue Jeanne d'Arc

    FRANÇAIS

    Façades grises, sans ornement. Portes métalliques laissant deviner, à travers leurs vitres opaques, des couloirs d'entrée plongés dans une demi-pénombre. Certains numéros de rue sont grossièrement peints à même les murs. Gouttières rouillées. D'autres portes, encore, en bois, à la peinture écaillée et aux vitres minces, recouvertes de poussière. Sur la façade d’un immeuble, une verrière laisse voir un genre de salon au premier étage, aux couleurs absurdement vives, vulgaires, surgies des années 70. Des placards fermés par de long rideaux oranges et mauves. Des plantes artificielles.

    (Tout n'est que syphilis)

    ENGLISH

    Gray, unadorned facades. Metal doors hinting, through their frosted glass, at entrance hallways bathed in semi-darkness. Some street numbers are roughly painted directly onto the walls. Rusty gutters. Other doors, made of wood, with peeling paint and thin, dust-covered panes. On the facade of one building, a glass canopy reveals a kind of living room on the first floor, with absurdly bright, vulgar colors reminiscent of the 70s. Cabinets closed with long orange and mauve curtains. Artificial plants.

    (Everything is syphilis)

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  • Jeunesse / Youth

    FRANÇAIS

    Je suis seul dans un couloir d'immeuble, ouvert d'un côté sur une vaste cour intérieure, qui donne sur d'autres couloirs, d'autres logements ouverts, des terrasses, etc. Je regarde particulièrement un minuscule appartement au dernier étage, qui n'est séparé du ciel que par une bâche en plastique. Je me demande comment la personne qui y vit fait quand il pleut, ou en hiver. Peut-être est-ce l'appartement d'une fille que j'ai connue, ou le mien quand j'étais jeune, ou les deux à la fois. Ce décor me renvoie à ma jeunesse, à la notion de solitude, d'inconfort, de pauvreté, de vulnérabilité que j'associe à la jeunesse, à la première expérience de la vie seul, que j'essaie généralement d'oublier, et j'entends mentalement une musique étrange, mélange de bruits parasitaires et d'une voix de cantatrice déformée et dissonante, que j'identifie comme une musique que j'aurais soit écoutée, soit composée, autrefois ; et cette musique m'angoisse, elle est oppressante et malsaine, et elle me renvoie à un dernier souvenir. Le souvenir d'instants de terreur, à la fin de mon adolescence et au début de mes études, où dans un demi-sommeil je sentais une présence mauvaise autour de moi, dans ma chambre, dans mon studio, une présence maléfique que j'oubliais et voulais oublier la plupart du temps, mais dont la conscience me revenait dans l'assoupissement ou au réveil, et c'était alors tout le reste de ma vie qui n'était qu'un rêve.

    ENGLISH

    I am alone in an apartment building hallway, open on one side to a vast inner courtyard, which connects to other hallways, other exposed apartments, terraces, and so on. My gaze is drawn in particular to a tiny apartment on the top floor, separated from the sky only by a plastic tarp. I wonder how the person living there manages when it rains, or in winter. Maybe it's the apartment of a girl I once knew, or mine when I was young – or both at once. This setting brings me back to my youth, to the notion of solitude, discomfort, poverty, vulnerability – things I associate with being young, with the first experience of life alone, something I usually try to forget. And in my mind, I hear a strange kind of music, a mix of static noise and a distorted, dissonant opera singer’s voice. I recognize it as music I once either listened to or composed – and it unsettles me. It’s oppressive and unhealthy, and it brings back one final memory. A memory of moments of terror, at the end of my adolescence and the beginning of my student years, when in a half-sleep I would feel a malevolent presence around me – in my bedroom, in my studio – a dark presence that I would mostly forget, or want to forget, but whose awareness would return to me in drowsiness or upon waking. And then it would seem as if the rest of my life was nothing but a dream.

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