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lieux du passé

  • IUT / Institute of Technology (1993)

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    FRANÇAIS

    J'aimais les vieux couloirs de l'IUT ; et plus encore ses cages d'escalier qui, à partir d'une certaine hauteur, étaient constamment désertes et silencieuses. Elles étaient comme des zones de tranquillité ou d'anonymat où je passais de temps à autre, quitte à faire un détour, pour le plaisir d'entrer quelques secondes dans cet espace étrange à l'écart de la fourmilière. Il m'arrivait d'en rêver. Ou de fantasmer à leur sujet. Je ne saurais pas dire quoi exactement ; peut-être de gravir - ou descendre - les marches éternellement, ou alors de découvrir des étages inconnus, nouveaux, fascinants.

    Ai-je montré ces couloirs, ces cages d'escalier, à Laura, lorsqu'elle était venue me rendre visite à Nancy ? L'ai-je rêvé ? L'ai-je simplement imaginé puis intégré fallacieusement au récit de ma vie ?

    « Elle vous avait suivi docilement dans les couloirs infinis de l'Université, toujours plus sombres, plus silencieux, au fur et à mesure que vous y avanciez ; parfois vous croisiez de petits groupes d'étudiants, silencieux, semblant attendre quelque chose, ou assis à des pupitres, à même le couloir. Vous vous étiez ensuite perdus dans d'interminables cages d'escaliers, où de nombreux d'étages s'avéraient inaccessibles, à travers leurs portes vitrées verrouillées, que d'autres couloirs, d'autres escaliers. »

    Je rêve encore régulièrement, je rêve régulièrement depuis vingt ans des couloirs de la fac de Lettres et de l'IUT, et de ceux de mon lycée, de ceux du collège... Des couloirs où je me perds, où je cherche une salle que je ne trouve pas, des couloirs que je hante en sachant que je n'ai plus rien à y faire, ou bien, au contraire, où je reviens pour acquérir quelque chose que j'ai raté à l'époque et qui me manque. Parfois bondés, bruyants, pleins de vie. Parfois silencieux et obscurs. Ils sont le lieu, quoi qu'il en soit, où se rencontrent le destin individuel dans ses moments les plus décisifs - la formation, les choix faits pour l'avenir - et la découverte de la vie collective, l'appartenance heureuse ou pénible au troupeau.

    ENGLISH

    I loved the old corridors of the Institute of Technology; and even more so its stairwells which, from a certain height, were constantly deserted and silent. They were like zones of tranquility or anonymity where I would occasionally pass through, even if it meant taking a detour, just for the pleasure of spending a few seconds in this strange space, apart from the bustle. Sometimes I dreamed of them. Or fantasized about them. I couldn’t say exactly what; maybe endlessly climbing – or descending – the steps, or discovering unknown, new, fascinating floors.

    Did I show those corridors, those stairwells, to Laura when she came to visit me in Nancy? Did I dream it? Did I simply imagine it and then deceitfully incorporate it into the story of my life?

    "She had obediently followed you through the endless corridors of the University, growing darker, quieter the further you went; sometimes you crossed small groups of students, silent, seeming to wait for something, or sitting at desks right in the hallway. You then got lost in endless stairwells, where many floors proved inaccessible, behind their locked glass doors, leading to other corridors, other staircases."

    For twenty years now, I still regularly dream of the corridors of the Faculty of Letters and the Institute of Technology, and of those of my high school, of my middle school… Corridors where I get lost, where I search for a room I can’t find, corridors I haunt knowing I no longer belong there, or on the contrary, where I return to retrieve something I missed at the time and that I now lack. Sometimes crowded, noisy, full of life. Sometimes silent and dark. They are, in any case, the place where individual destiny meets its most decisive moments – education, choices made for the future – and the discovery of collective life, the happy or painful belonging to the herd.

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  • Somnambule en larmes / Sleepwalker in tears (2005)

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    FRANÇAIS

    Elle est à Nancy et nous repassons devant le 29 rue de la Source. J'émets l'idée de sonner chez quelqu'un, au hasard, et de faire des photos dans la cour intérieure, où aucun de nous deux n'est entré depuis des années. C'est excitant comme une plaisanterie de gosses : faire toutes les sonnettes et attendre qu'on nous ouvre. Après plusieurs essais infructueux, nous obtenons enfin une réponse et entrons. Dès le sombre couloir du premier corps de bâtiment, elle passe des rires aux sanglots ; derrière l'aspect anodin de cette petite excursion se joue quelque chose de beaucoup plus profond et douloureux, et je lui suis presque reconnaissant de verser ces larmes. Moi je n'y arrive pas, ou alors à des moments incongrus, inopportuns. Les murs étaient blancs à l’époque – ils ont été repeints. Les volets de son ancien appartement sont fermés. Nous sonnons mais personne n'ouvre. La cage d'escalier est déserte, il n'y a aucun bruit, aucune odeur. C'est un moment curieusement douloureux et excitant à la fois ; je prends des photos sans arrêt, des lieux et d'elle qui y avance comme une somnambule en larmes, et je me sens extérieur à tout cela, pur voyeur de sa tristesse, protégé par l'écran que forme l'objectif entre le monde et moi.

    ENGLISH

    She is in Nancy, and we pass again by 29 rue de la Source. I suggest ringing someone’s doorbell at random, and taking photos in the inner courtyard, where neither of us has set foot for years. It feels like a childish prank: ringing all the bells and waiting for someone to answer. After several unsuccessful attempts, we finally get a response and enter. From the dim hallway of the first building, her laughter turns into sobs; beneath the seemingly innocent nature of this little outing lies something much deeper and more painful, and I am almost grateful to her for shedding these tears. I can’t manage it, or only at awkward, inconvenient moments. The walls had been white back then – they’ve been repainted now. The shutters of her old apartment are closed. We ring the bell but no one opens. The stairwell is empty, silent, scentless. It’s a strangely painful yet thrilling moment; I keep taking photos, of the place and of her moving like a sleepwalker in tears, feeling completely outside it all – a pure voyeur of her sadness, protected by the screen the camera lens forms between the world and me.

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  • Absence totale de ciel / Total absence of sky (2000)

    FRANÇAIS

    Des couloirs à l'éclairage tantôt cru et aveuglant, tantôt insuffisant et sinistre, que je revois en rêve, et où je me perds avec une excitation morose. Escalators, locaux techniques, passages de service. Le bruit des systèmes de ventilation, léger mais constant. Un grondement sourd comme celui d'une machine paisible dont les clients qui déambulent feraient eux-mêmes partie. J'y errais en fin d'après-midi, lisant interminablement la presse dans les allées du Monoprix, déambulant entre les rayonnages impeccables. La lumière des néons, l'absence totale de ciel me reposaient et me rassuraient.

    ENGLISH

    Corridors whose lighting was sometimes harsh and blinding, sometimes dim and sinister, that I revisit in dreams and where I lose myself with a kind of morose excitement. Escalators, technical rooms, service passages. The sound of ventilation systems, light but constant. A dull hum, like that of a peaceful machine, of which the wandering customers seemed to be a part themselves. I would wander there in the late afternoon, endlessly reading the newspapers in the aisles of the Monoprix, drifting between the impeccable shelves. The neon lighting, the complete absence of sky, soothed and reassured me.

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