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sadness

  • Pension de famille / Boarding house (1996)

    FRANÇAIS

    Je suis seul et arrive dans une espèce de pension de famille, en région parisienne. J'ai réservé pour trois jours. Il n'y a personne à part le propriétaire. L'établissement est minuscule, mais avec un nombre invraisemblable de pièces, de petits couloirs, d'escaliers. Tout est chaleureux, boisé, avec d'innombrables petits bibelots. Une vraie maison de poupées, et une maison de famille en même temps – une maison de famille telle que je n'en ai jamais connue dans ma vie et n'en connaîtrai probablement jamais. Cette idée me frappe. Une fois dans la chambre, je me mets à pleurer, sans savoir vraiment pourquoi ; à la fois de tristesse et de soulagement d'être enfin dans un tel endroit.

    ENGLISH

    I am alone and arrive at a sort of boarding house in the Paris region. I’ve booked for three days. There is no one there except the owner. The place is tiny, but with an unbelievable number of rooms, small corridors, and staircases. Everything is warm and wooden, filled with countless little knickknacks. A real dollhouse, and a family home at the same time – a family home unlike any I’ve ever known in my life and probably never will. This idea strikes me. Once in the room, I start to cry, without really knowing why; both from sadness and from relief at finally being in such a place.

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  • Effluves / Faint smells (2007)

    FRANÇAIS

    Les rues oubliées de Nancy, la nuit, avec leurs immeubles obscurs, l'hôpital central et ses grilles menaçantes, les jardins ouvriers, les ruelles, forment une ville secrète que ne cachent qu'aux touristes la Place Stanislas et les quelques hauts lieux du centre. Revenir à Nancy par ces rues désertes, de nuit, m'a toujours mis mal à l'aise, comme quelque chose qui sent vaguement la mort. Qui sent presque au sens propre – car j'ai toujours assimilé Nancy à l'odeur de la terre, d'une cave ou d'égouts, une odeur légère, presque imperceptible, et d'une profonde tristesse.

    Un lundi blafard au parc. Les allées sont désertes, à l'exception d'un paon, qui incompréhensiblement se promène en liberté. Quelques maigres effluves, mélange de végétation, de bière, de tabac, de déjections animales et de parfum, me frappent et évoquent en moi des images indescriptibles, à la limite de la conscience, incroyablement puissantes ; et j'ai alors l'impression d'être un prisonnier évadé, certain d'être rapidement repris, et cette pensée m'effraye.

    Il arrive que je marche dans les rues d'une ville quelconque, et soudain me monte au nez un effluve de tabac, l'odeur fantôme de la bière, les émanations d'une cuisine ; et me reviennent immédiatement la cité universitaire, la nuit vite tombée en automne, et les filles presque inconnues dont je partageais les repas dans la cuisine commune. Cette vie où chacun se sentait, et était, de fait, un étranger, où chacun n'était que de passage et où par conséquent il était possible d'aborder n'importe qui et de lui proposer de partager un repas ou une soirée paisible, sans que cela n'étonne personne. En une fraction de seconde, avant le moindre mot n'ait le temps de naître dans ma conscience, tout cela m'envahit à m'en briser le cœur, et je dois, sans rien montrer à celui ou celle qui m'accompagne et qui ne le comprendrait pas, tout oublier encore une fois.

    ENGLISH

    The forgotten streets of Nancy at night, with their dark buildings, the central hospital and its threatening gates, the workers’ gardens, the alleyways, form a secret city that only the Place Stanislas and a few prominent spots in the center hide from tourists. Returning to Nancy by these deserted streets at night has always made me uneasy, like something vaguely smelling of death. Almost literally – for I have always associated Nancy with the smell of earth, of a cellar or sewers, a faint, almost imperceptible scent, and a deep sadness.

    A pale Monday at the park. The paths are deserted, except for a peacock, inexplicably roaming free. A few faint smells – a mix of vegetation, beer, tobacco, animal droppings, and perfume – strike me and evoke in me indescribable images, at the edge of consciousness, incredibly powerful; and then I feel like an escaped prisoner, certain to be caught soon, and this thought frightens me.

    Sometimes I walk through the streets of some random city, and suddenly a whiff of tobacco rises to my nose, the ghostly smell of beer, the emanations of a kitchen; and immediately the university dorm comes back to me, the night falling quickly in autumn, and the girls I barely knew with whom I shared meals in the common kitchen. That life where everyone felt – and was – in fact, a stranger, where everyone was just passing through, and where it was therefore possible to approach anyone and invite them to share a meal or a quiet evening, without it surprising anyone. In a fraction of a second, before a single word can form in my mind, all this overwhelms me to the point of breaking my heart, and I must, without showing anything to the one who is with me and would not understand, forget it all once again.

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  • Cocon triste / Sad cocoon (2002)

    FRANÇAIS

    J'aimais la résidence étudiante où vivait J. dans une petite rue endormie perpendiculaire à l'avenue Leclerc. Elle me rappelait – en plus silencieuse, en plus obscure et déserte, comme dans mes rêves – la cité universitaire où j'avais passé tant d'heures à errer de couloir en couloir et de chambre en chambre, auprès de quiconque serait là et voudrait bien de moi. Elle me faisait, pourtant, moins l'effet d'une résidence étudiante que d'un foyer de jeunes travailleurs ; il y avait dans l'air une ambiance, peut-être entièrement imaginaire, d'échec, d'errance dans la vie et de solitude. Un soir, j'avais croisé au rez-de-chaussée, ou dans une salle commune à un étage quelconque, quelques résidents silencieux, rassemblés dans la pénombre devant une télévision. J'avais envié cette atmosphère de cocon triste. Je ne savais pas encore que des années plus tard, je fréquenterais une fille vivotant dans une telle structure, loin de sa famille, incommensurablement seule, incomplète et avide d'une présence à accueillir chez elle et en elle. Je n'avais pas osé lui dire que j'aimais la savoir dans un tel environnement, que je la voulais justement triste et vulnérable, mendiant la moindre preuve d'amour que je pourrais lui donner, et qu'encore au-delà de tout cela, dans un recoin encore plus sombre de mes désirs, tout ce qu'il y avait de masochiste et de mort en moi, inexplicablement, l'enviait, elle aussi.

    ENGLISH

    I liked the student residence where J. lived, tucked away on a sleepy little street off Avenue Leclerc. It reminded me – quieter, darker, more deserted, like in my dreams – of the university housing where I had spent so many hours wandering from corridor to corridor, room to room, lingering near anyone who happened to be there and might accept me. Yet it felt less like a student residence than a shelter for young workers; there was, in the air – perhaps entirely imagined – a sense of failure, of drifting through life, and of solitude. One evening, I passed by a few silent residents, either on the ground floor or in a common room somewhere, huddled together in the dim light in front of a television. I envied that cocoon of quiet sadness. I didn’t yet know that, years later, I would be involved with a girl barely scraping by in a place like that, far from her family, immeasurably alone, incomplete, and craving a presence to welcome into her home and into herself. I hadn’t dared to tell her that I liked knowing she lived in such a place – that I wanted her precisely like that: sad and vulnerable, begging for the smallest sign of love I could offer her. And beyond all that, in a still darker corner of my desire, everything within me that was masochistic and death-bound envied her too, inexplicably.

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  • Passage Marceau (2012)

    FRANÇAIS

    Je m'enfonce, seul, sous le passage Marceau, à la recherche de ces fameux bains que vantent des enseignes de bois effacées par le temps. Ils ont disparu depuis longtemps, mais je trouve avec soulagement ce que ce genre de passages offre toujours : la semi-pénombre, le silence, et cette odeur d'urine immémoriale qui me transporte immédiatement vers ma plus petite enfance, dans les WC de l'école primaire où je me cachais et attendais que le temps passe. Cette atmosphère unique, inimitable, de pisse et de détergent, est pour moi le symbole même du passé, du froid, de la solitude, d'une tristesse vague mais lancinante, et plus voluptueuse que n'importe quoi d'autre.

    ENGLISH

    I wait for someone to enter or leave, and slip in as soon as possible between two ageless, indifferent students. No guard, no cleaning lady stops me or demands, every few steps, that I justify my presence here. But all the way through, I walk these corridors with the feeling of being a gatecrasher, a stowaway doomed to expulsion and the harshest consequences. A smell of fresh paint still lingers in the silent hallways, as if someone had tried, before I arrived, to cover up what needed hiding, to erase even the most miserable traces left by a few people I once loved. I come across no one. I’ve forgotten the room numbers. I can’t find the kitchen. I’m not even sure which floor I’m on. It’s like in those dreams where I return to the building I grew up in, but everything has changed – the stairwell, the layout of the walls, everything except the silence and the absence of life.

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